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L A V I G E R I E . be
P I S A I

Réponse à la lettre de 138 intellectuels musulmans

Pontificio Istituto di Studi Arabi e d’Islamistica
mardi 27 novembre 2007 par Webmaster
Le PISAI (Institut Pontifical d’Etudes Arabes et Islamiques) de Rome.

Un des instituts spécialisés, fondés par les Pères Blancs, qui permettent de mieux connaître la culture et la foi du monde musulman et d’ouvrir des chemins de dialogue.

“Une parole commune entre nous et vous”

La Lettre ouverte et appel des guides religieux musulmans aux responsables des différentes Eglises chrétiennes, comme message de fête, à l’occasion de la clôture du jeûne du mois de Ramadân (11/10/2007), et comme rappel-anniversaire de la lettre des trente-huit savants musulmans adressée à S.S. le Pape Benoît XVI, en 2006, est un événement hautement significatif qu’on ne peut pas ne pas remarquer et dont il est nécessaire de souligner l’importance. Voilà pourquoi, nous, membres du staff de l’Institut Pontifical d’Etudes Arabes et d’Islamologie (PISAI) de Rome, tout particulièrement intéressés aux relations entre chrétiens et musulmans, nous croyons de notre devoir d’exprimer notre avis sur ce document.

Essayant de rentrer sans a priori dans la dynamique de cet événement tel qu’il se présente, parce que nous sommes convaincus de la bonne foi de ceux qui l’ont suscité, purifiés qu’ils étaient par le long jeûne de Ramadân, nous voudrions rendre compte de tout ce que nous apprécions dans la présentation et dans le contenu de ces pages. Notre fréquentation relativement longue et assidue du patrimoine culturel et religieux de l’Islam, ainsi que nos contacts réguliers avec les membres de la communauté musulmane, nous permettent de remarquer la nouveauté de ce geste et nous autorisent à attirer l’attention des non-musulmans sur sa qualité.

D’abord, nous sommes frappés par la largeur des horizons sous lesquels se situe ce texte ; largeur au niveau des signataires : cent trente-huit personnalités musulmanes provenant de nombreux pays situés dans tous les continents et dont l’appartenance religieuse témoigne de nuances variées ; largeur au niveau des destinataires : tous les guides des différentes Eglises chrétiennes dont vingt-huit sont explicitement nommés.

Dans le même ordre de constatations, nous soulignons l’étendue du champ concerné, à savoir les musulmans, les chrétiens, les juifs et les hommes du monde entier. Les auteurs du texte ne se réfugient pas dans un pro domo revendicatif de l’umma, mais ils se situent, au contraire, comme partenaires de l’humanité pour laquelle ils proposent leur façon de concevoir les fondements et les principes reconnus aussi par d’autres communautés, en vue de sa survie dans une paix effective et générale.

L’ampleur des perspectives est également un trait notoire de ce texte. Ses auteurs s’intéressent certes au sort du monde actuel tel qu’il est en jeu ici et maintenant, mais également à celui des ‘âmes éternelles’ qui se jouera ailleurs et demain. Cette double visée, à la fois immanente et transcendante, fait circuler dans ce discours un courant fort et libérateur.

Bien sûr, nous sommes également frappés par le caractère fondamental du propos : Dieu et l’homme. Il est bien plus facile de se limiter à des idées d’autant plus généreuses qu’elles sont vagues et générales, que de réclamer ainsi l’attention sur l’urgence des droits de Dieu et de ceux de l’homme qui exigent de chacun une attention soutenue et un amour actif et concret.

Nous sommes également sensibles à la réelle attention que portent les signataires de cette lettre à la référence capitale qui fonde l’autre en tant que juif ou chrétien, à savoir le double commandement de l’amour de Dieu et du prochain dans le Deutéronome et dans l’Evangile de Matthieu. Cette volonté de reconnaissance de l’autre, dans le désir le plus profond de ce qu’il veut être, nous apparaît comme un des points fondamentaux de ce document ; elle seule peut garantir le succès d’une vraie relation entre communautés culturellement et religieusement différentes.

En même temps, nous apprécions la façon dont les auteurs du texte, en tant que musulmans, voient dans ces deux commandements la définition même leur propre identité. Ils ne le font ni par complaisance ni par politique, mais, en vérité, uniquement à partir de leur proclamation de l’unicité divine (al-taw|îd), pivot de la foi musulmane. Effectivement, nous reconnaissons que l’acceptation radicale de l’unicité divine est une des expressions les plus authentiques de l’amour dû à Dieu seul et que, la foi n’allant jamais sans les bonnes oeuvres, comme ne cesse de le répéter le Coran (al-ladîna âmanû wa ‘amilû al-¡âli|ât : al-Baqara 2, 25), l’amour de Dieu est indissociable de celui du prochain.

Nous savons gré à ceux qui nous interpellent, en soulignant ainsi l’accord sur l’essentiel qui fonde nos diverses communautés de croyants, de conserver cependant une vision réaliste et courageuse. En effet, d’une part, ils ne gomment pas la différence de nos options christologiques ; et, d’autre part, ils ne passent pas sous silence le problème de la liberté religieuse (lâ ikrâha fî l-dîn : al-Baqara 2, 256) qu’ils considèrent comme étant un point crucial.

Ce réalisme ne les empêche pas d’avoir une vision positive sur les obstacles et les différences qui demeurent entre nous ; si bien que, fidèles à la tradition coranique qui lesinspire, ils n’y voient qu’une occasion d’émulation dans la recherche du bien commun (fastabiqû l-hayrât : al-Mâ’ida 5, 48).

C’est certainement cette vision positive des difficultés qui leur a permis d’écarter la polémique, de se dépasser, de prendre sur eux-mêmes et de ne point tenir compte de leur déception due à une réponse qui ne correspondait pas à leur attente, à la suite de leur lettre adressée à S.S. le Pape Benoît XVI, en 2006.

En lisant ce document, nous remarquons l’existence, de leur part, d’un regard neuf et créatif , porté sur le Texte coranique et celui de la Tradition prophétique, par rapport à certaines interprétations historiques, marquées par des situations particulières qui en rendaient la portée relativement restrictive en ce qui concerne la considération des non-musulmans.

Nous pensons, en particulier, à la portée générale qu’ils donnent aux versets de Âl ‘Imrân 3, 113-115 relatifs à ‘une communauté droite qui récite les versets de Dieu durant la nuit, tout en se prosternant’ que nombre de commentateurs assimilaient jusqu’ici aux seuls chrétiens sur le point de se convertir.

Nous sommes heureux de voir que les citations bibliques et évangéliques utilisées dans ce document sont faites à partir des sources et que les explications qui en sont données se fondent parfois sur les langues originelles : l’hébreu, l’araméen et le grec. Cela témoigne d’un grand respect et d’une réelle attention à l’autre, en même temps que d’un esprit authentiquement scientifique. Là aussi nous notons l’émergence d’un nouveau regard.

Pour conclure, nous voulons insister sur l’attitude a priori positive des auteurs du texte dans leur interprétation des trois passages parallèles des Evangiles synoptiques. Ils auraient pu choisir des exégèses bien plus restrictives et minimalistes que la tradition chrétienne pouvait aisément leur fournir et qu’ils n’ignorent certainement pas. Stimulés par leur attitude, nous ne voulons retenir, nous aussi, que l’interprétation maximaliste selon laquelle les textes du Coran et de la Tradition prophétique ne limitent pas aux seuls membres de l’umma les bienfaits que tout bon musulman doit prodiguer à son prochain au nom de sa foi en Dieu et de son amour exclusif pour lui.

Un tel document nous encourage à poursuivre décidément notre engagement pour que la différence de nos langues et de nos couleurs (ihtilâf alsinati-kum wa alwâni-kum : al-Rûm 30, 22), c’est-à-dire nos différences culturelles profondes, loin de nous engager dans le soupçon, la méfiance, le mépris et la dissension, comme cela s’est souvent vérifié dans l’histoire de nos rapports et comme c’est toujours le cas dans le monde d’aujourd’hui, soient perçues comme des signes pour ceux qui savent (inna fî dâlika la-âyâtin li-l-‘âlimîna), c’est-à-dire, comme une miséricorde provenant de notre Seigneur.

Miguel Angel Ayuso Guixot, directeur
Renaud Etienne, directeur des études
Cottini Valentino, prof.
Lagarde Michel, prof.
Phiri Felix, prof.

Rome, le 25 octobre 2007


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